Ils ont été reçus pendant 1h30 ce mercredi matin mais rien de concret n’est réellement ressorti de cet entretien avec le COJO de Paris 2024. Antonio Espinos, le président de la Fédération mondiale (WKF), Toshi Nagura, le secrétaire général de la WKF, et Francis Didier, le président de la FFK, « n’excluent aucune option », envisagent de « lancer tous les recours possibles », « (d’)avoir accès au dossier en toute transparence », et de ne « rien lâcher » pour que le Karaté soit aux JO 2024. Mais les questions demeurent en suspens. Impressions et réactions.

Par Ludovic Mauchien / Photo : Kphotos


 

Ce 6 mars marque-t-il la fin des espoirs du karaté de voir les JO de Paris en 2024 ? Non ! Tant qu’il y a de la vie… Mais si infime soit-il, si compliqué à démêler va-t-il s’avérer, cet espoir de voir le karaté aux JO de Paris demeure.

Antonio Espinos, Toshi Nagura, président et secrétaire général de la WKF, ainsi que Francis Didier, président de la FFK, ont été reçus ce matin à 11 h par Tony Estanguet, le président du COJO 2024, Etienne Thobois, le directeur général, Jean-Philippe Gatien, le directeur des sports et Aurélie Merle, la directrice des sports adjointe. Ils se sont exprimés par voie de communiqué de presse.

Antonio Espinos, président de la WKF

« Nous sommes venus à Paris avec l’objectif que le COJO reconsidère sa position par rapport à leur choix de ne proposer que quatre disciplines additionnelles. En tant que Président de la Fédération Mondiale, j’ai défendu avec Toshi Nagura et Francis Didier notre grande famille de karatékas, nos athlètes aujourd’hui et nos espoirs de demain.

Nous avons donc proposé de mettre le karaté en tant que cinquième sport additionnel, mais nos interlocuteurs ne nous ont pas répondu, sauf à évoquer le nombre total d’athlètes ne pouvant pas être dépassé aux Jeux, argument ne répondant d’ailleurs pas à notre demande. Mais ils ne nous ont pas dit qu’ils devaient limiter leur proposition initiale à quatre sports. Il n’y a d’évidence pas eu de commande du CIO en ce sens.

Nous avons également demandé au COJO d’assurer toute la transparence nécessaire par rapport à ce dossier, pour que nous soient livrés des arguments clairs et objectifs expliquant la sélection des sports. Au bout du compte, nous ressortons de cet entretien sans qu’aucun critère ou raison valable ne nous ait été présenté. Nous nous donnons donc quelques jours de réflexion, pendant lesquels nous allons consulter des experts, et nous lancerons un plan d’action avec un seul et unique objectif : intégrer le karaté à Paris en 2024. Nous allons étudier toutes les possibilités et nous n’exclurons donc aucune option. Tous les recours possibles seront lancés à partir du moment où ils serviront notre objectif.

Nous allons également redemander un accès total au dossier. Nous avons défendu notre famille et nos athlètes avec fermeté et dans cette optique nous sommes satisfaits de cet entretien puisqu'il va nous permettre de démarrer nos actions. Une chose est certaine, nous n’allons rien lâcher ».

Toshi Nagura, secrétaire général de la WKF

« En tant que représentant japonais, j’ai voulu insister sur la situation actuelle du karaté, présent dans tous les Jeux continentaux, aux Jeux de la jeunesse et aux Beach Games, avant Tokyo 2020. A Tokyo, le CIO a accepté de nouveaux sports dont le karaté, on ne peut pas comprendre son rejet actuel alors que les Jeux de Tokyo ne se sont encore pas déroulés ».

« METTRE DES TATAMIS SOUS LA TOUR EIFFEL, C’EST POSSIBLE, C’EST URBAIN ! »

Francis Didier, Président de la FFKaraté

« La position de la FFK est de mettre tout en œuvre, aux côtés de la WKF, pour que le karaté soit présent aux Jeux Olympiques à Paris en 2024. La proposition faite par le COJO va à l’encontre du respect des athlètes, de notre famille de pratiquants… du bon sens, tout simplement. Comment peut-on dire à nos sportifs, avant même qu’ils aient pu faire leurs preuves à Tokyo en 2020, qu’ils ne seront pas à Paris en 2024 ? Allez expliquer à Steven Da Costa, notre champion du monde, à Gwendoline Philippe et Alizée Agier, toutes deux « Grand Winner 2018 », et à tous nos espoirs, qu’ils ne pourront pas représenter leur discipline à Paris, devant leur public… avant même qu’ils aient pu goûter à ce premier rêve olympique. Mettons-nous à leur place, mettez-vous à leur place…

Le timing de cette prise de décision va à l’encontre du bon sens et c’est ce pourquoi nous irons jusqu’au bout. Les athlètes ont le sentiment d’avoir été humiliés. J’invite d’ailleurs les athlètes, de toutes les disciplines olympiques à se mettre à la place de nos jeunes karatékas. Comment réagiraient-ils ? Comment réagirait leur fédération nationale ?

Nous avons également abordé avec les dirigeants du COJO leur stratégie par rapport aux médailles et à la performance des Français pour ces Jeux olympiques à domicile. En effet, le karaté tricolore se porte très bien à l’international. Nous sommes un pourvoyeur important de médailles pour la France puisque, historiquement, nous nous classons au premier rang européen et au second rang mondial. Il nous a été clairement dit que ce n’était pas un argument. Nous prenons donc bonne note que le gain des médailles n’est plus un objectif prioritaire.

A priori, ils souhaitent des disciplines urbaines. Si cela avait était un critère affiché au départ, nous nous serions adaptés en proposant des solutions… Mettre des tatamis sous la Tour Eiffel, c’est possible, c’est urbain !

Je tiens à rappeler que le karaté est une discipline qui plaît aux jeunes (120 000 licenciés), qui est présente sur l’ensemble du territoire avec nos 5 000 clubs et qui se pratique en loisirs mais aussi en compétition. Le karaté, c’est le respect, le courage, la politesse, le contrôle de soi… tant de valeurs éducatives qui portent notre pratique et qui font de ce sport l’un des plus pratiqués chez les jeunes en France.

Notre dossier cochait, comme cela nous a été dit par ses responsables, toutes les cases exigées par le COJO, c’est pourquoi nous demandons maintenant à avoir accès au dossier en toute transparence. Nous sommes dans notre bon droit. Nous allons continuer à nous battre pour que le karaté soit présent à Paris, pour nos athlètes et pour toutes les valeurs inhérentes à notre pratique ».