Le sport, ce n’est pas qu’une performance. L’art martial, ce n’est pas qu’être plus fort que l’autre. Ecrire cela peut apparaître galvaudé. Et pourtant… La soirée organisée en hommage à Alain le Hétet et Michaël Milon samedi 29 septembre à Carcassonne, en est un très bel exemple. Transmission, respect, fraternité, convivialité, humanité… n’étaient pas de vains mots.

Champions français et étrangers des années 80 à nos jours ont été réunis par Thierry Masci. Romain Anselmo, Gilles Cherdieu et Christophe Pinna nous font partager leur profonde émotion…

Par Ludovic Mauchien / Photos : DR


 

Romain Anselmo : « De l’énergie à l’état pur ! »

« On s’est retrouvé en famille, tout simplement ! Bruel chante « rendez-vous dans 10 ans ». Nous, c’était dans 20 ans ! (Il rit). 20 ans après, on se retrouve ! Cela a été des moments de bonheur merveilleux, comme quand on s’est retrouvé en salle d’échauffement tous ensemble, entre Tapol, Masci, Gilou (Cherdieu), Alagas… Put.., comment dire ?... MERVEILLEUX !

C’était un moment de partage et, surtout d’énergie. C’était juste de l’énergie à l’état pur ! Se retrouver ensemble, c’était absolument génial ! Avec la plupart, on s’est recroisés en compétition, mais toujours très vite, en coup de vent. Là, on a vraiment pris le temps, on a passé deux jours ensemble.

C’est bizarre ce que je vais dire mais, le Karaté là-dedans, on s’en fout (il rit). On a tous fait un combat de 2 minutes et c’était cool. Mais, ce qui est important avant tout, ce sont les moments que l’on a partagé. L’équipe de 98 était au grand complet, à part Alain Le Hétet évidemment. On a refait dix fois nos combats, le monde, l’avenir, hier... C’était absolument génial ! On espère tous que cela va faire des petits. Il faut que l’on se voit ! ».

 

Gilles Cherdieu : « J’avais oublié la sensation… Quel kif ! »

« Quel kif ! Quel pied ! Cela m’a fait chaud au cœur de retrouver des amis avec qui j’ai eu plaisir de repartager des moments de vie oubliés. En dehors de la prestation Karaté en elle-même, le plus beau, ce sont ces retrouvailles et ce partage. Je pense que nos amis disparus auraient apprécié. Le maître mot, c’était l’émotion, LES émotions. Beaucoup de plaisir, un peu de tristesse. Du plaisir et du bonheur parce que c’est ça notre vie. On se retrouve autour de quelque chose que l’on a de commun et qui nous a formatés. On est devenu aujourd’hui ce que l’on est avec ces moments et avec ces gens. C’était juste à vivre et à apprécier. Les mots ne peuvent pas refléter ce que nous avons tous ressenti.

Le combat, c’était anecdotique. C’était avant tout l’ambiance et la réunion de toutes ces énergies. On était là pour une action commune, en mémoire de nos amis, en faveur de la lutte contre le cancer. Mais même si c’était anecdotique, arrivés sur le tatami, on a retrouvé nos instincts, il était hors de question que l’on perde (il éclate de rire). C’était bon !...

Quel kif de re-marquer des points ! J’avais oublié la sensation… Cela fait 20 ans que je n’avais pas ressenti ce plaisir ! Je me suis impressionné moi-même (il rit). Je ne sais pas ce qui s’est passé… J’ai fait quelques entraînements en amont et j’avais commencé à retrouver des petites sensations qui se sont manifestées lors du combat face à Kokubun. Je marque le premier point avec mon spécial. Les années passant, j’ai de plus en plus de mal à le faire, c’est moins fluide, moins naturel et là, c’est sorti tout seul ! Il ne faut pas être nostalgique, mais waouh !... C’était bon, c’était superbe. Ça m’emmerde même d’avoir gagné, dans le fond, parce que l’idée n’était pas la performance mais quand on est pris là-dedans, tu ne peux pas t’empêché. L’instinct naturel refait surface.

Je tiens à saluer Thierry (Masci) qui a été mon coach quelques fois en équipe de France. Il a fait preuve d’une pugnacité incroyable pour la réalisation de cet événement. Il n’a pas lâché ! Il a fait une belle chose ».

 

Christophe Pinna : « Le mot famille du Karaté prend son sens »

« Ca devrait se faire plus souvent. On se retrouve et on se remémore les années... (Il rit) C’est génial de retrouver des compétiteurs comme Haldun Alagas ou Ivan (Leal). A l’époque, on ne se parlait pas trop. On était des compétiteurs donc on avait des petites barrières de clan.

Le mot famille du Karaté prend vraiment son sens. Cela fait plaisir de retrouver des gars avec qui tu as été champion du monde en équipe, et pas qu’une fois. Il manquait Alain Le Hétet malheureusement. C’est beaucoup d’émotions mais je me suis mis dans une espèce de bulle. Il y avait comme une double peine pour moi. La peine d’Alain, bien évidemment. On était souvent en chambre ensemble. On a grandi ensemble dans l’équipe de France. On s’est souvent posé les mêmes questions. Quand Alain a gagné en Malaisie (94), cela a été un lourd fardeau qu’il a sorti de ses épaules, parce que les années avançaient et qu’il n’arrivait pas à concrétiser le titre qui lui manquait.

C’est toutes ces émotions, ces partages, ces discussions, jusque tard dans la nuit... ces souvenirs d’Afrique du sud aussi (96) qui, pour nous, a été l’occasion de rester très longtemps ensemble. On s’était rasé la tête. On était les champions ! La double peine, c’est que c’était une soirée pour le cancer. Et j’ai perdu ma mère et mon père du cancer. C’est une chose qui me touche. C’était une soirée un peu mitigée pour moi ».

 

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