3 journées de combat d’affilée, sans catégorie de poids, sans protection, au KO. Yes sir ! Ca, c’est du tournoi de Karate-Do ! C’est le World Open Tournament du Kyokushinkaï (IKO) organisé tous les 4 ans depuis 1975.

166 guerriers et 34 combattantes le 1er jour. 1 survivant le 3e jour après 8 combats. Celui qui gagne, c’est un mental de ouf’, un corps d’acier trempé, celui qui est capable de surmonter la douleur, bref, c’est le plus fort.

La 12e édition, c’est cette semaine (22-24 novembre à Tokyo). La légende continue de s’écrire… On vous la raconte…

Par Ludovic Mauchien / Photos : L. Mauchien / DR


Quand on vibre pour le Karaté, quand on aime le combat, il est des incontournables, des immanquables, des événements qu’il faut vivre au moins une fois dans sa vie. Le World Open Tournament du Kyokushinkaï (IKO) est incontestablement l’un de ses grands moments qui vous donne la sensation de vivre intensément votre passion.

Vous humez la tradition, vous respirez l’odeur du combat, vous sentez le KO, la sueur, le sang. Vous inspirez l’esprit de ces combattants ultimes, défiant les règles du mental ordinaire, dépassant le commun pour pénétrer l’insondable, les (éventuelles) limites de la conscience humaine, du « mental ».

Pour aller au bout, il faut certes de la chance, mais elle est réduite à sa portion congrue. Il faut surtout du mental, de la condition physique, de l’intelligence tactique et stratégique. Il faut survivre à 3 journées de joutes, soit 8 combats de 3 minutes sans protection et avec KO, dans un style de Karaté où l’art de l’esquive n’est pas la priorité, plus 1 épreuve de casse (Tameshiwari) !

Personnellement, j’ai eu la chance de couvrir cet événement à deux reprises, la première fois en 2003. C’est la dernière victoire japonaise ! Kiyama avait dominé le Russe Plekhanov, le Brésilien Teixeira avait terminé 3e avant de l’emporter en 2007. Côté Français, les cadors d’alors se nommaient Alexandre Rodrigues et Fabrice Fourment. Du lourd, du solide, du gaillard, du massif.

16 ans plus tard, les poids très lourds ont laissé place à des gabarits moins conséquents (cela ne veut pas dire imposants…), plus mobiles, plus affûté physiquement. L’école russe est toujours au top et présente 2 des 6 favoris avec Yeremenko, 7e en 2011 (1,80 m ; 92 kg), et Kochnev, ½ finaliste en 2015 (1,90 m ; 87 kg). L’école brésilienne est un peu en deçà par rapport à son glorieux passé écrit par Filho, Feitosa et Teixeira.

Quant aux Français, ils ne se sont jamais aussi bien portés. Finaliste en 2015 -une Première Tricolore-, Djema Belkhodja sera présent au Musashino Forest General Sports Plaza (Chofu, Tokyo) mais comme coach. Cette année, c’est sur Antonio Tusseau, dit « Tonio » (1,84 m ; 87 kg) que résident les espoirs. Et quels espoirs ! Pour la 1ère fois de l’histoire, un Français est présenté comme l’un des 6 favoris de l’épreuve ! On peut même avancer qu’il est dans le Top 3. Il est mis en exergue sur l’affiche du tournoi, un signe, un honneur !

Vainqueur du très renommé Open de New York en juin dernier (encore une première française), le sociétaire de l’ACBB, élève de Jacques Legrée et Julien Porterie, il n’aura jamais été aussi proche de pouvoir devenir champion du monde toutes catégories, le titre suprême (NDLR : le portrait d’Antonio Tusseau sera publié demain mercredi). Hajime !

Les Français

Ils sont 8. Outre Antonio Tusseau, Maxime Demeautis, Guillaume Grundler, ainsi qu’Audric Drogoul, Yacine Bouchedda, Ali Zeghbab et, chez les féminines, Shainez Elhaimour et Ludivine Vedapodagom (La Réunion), sont les hérauts français. Ils sont entourés par Maxime Demeautis, Djema Belkhodja et Lucian Gogonel.

Les favoris

Il ne doit en rester qu’un et il n’en restera qu’un au bout des 3 jours. Et pourquoi pas le Français Antonio Tusseau, présenté comme l’un des 6 favoris de l’épreuve ?

2 Russes et 3 Japonais figurent parmi les têtes d’affiche : Alexander Yeremenko, 7e en 2011 (1,80 m ; 92 kg), Kiril Kochnev, ½ finaliste en 2015 (1,90 m ; 87 kg), Yuta Takahashi (1,80 m ; 95 kg), Shohei Kamada (1,86 m ; 95 kg) et Shoki Arata (1,83 m ; 100 kg), 8e en 2015.

Les Russes Andrei Luzin (1,87 m ; 84 kg) et Ashot Zarinyan (1,75 m ; 79 kg) ainsi que le Japonais Mikio Ueda (1,87 m ; 102 kg), 6e en 2015, sont têtes de série.

Le tournoi

1er jour : 1 combat. 2e jour : 2 combats, épreuve de casse (Tameshiwari). Il reste 32 combattants. 3e jour : 5 combats (dont finale) + Tameshiwari si nécessaire pour départager un combat. Les combats, sans protection, durent 3 minutes + 2 prolongations de 1 minute si égalité.

Le programme

Vendredi 22. 1er tour hommes. Tournoi enfants (à partir de 6 ans, casqués).

Samedi 23. 4 tours femmes (1/4 de finale inclus). 2e et 3e tour hommes.

Dimanche 24. 4 femmes, 32 hommes, 2 vainqueurs.

Le 1er combat des Français

ŸAntonio Tusseau (1,84 m ; 87 kg) vs Nxumalo (Afs, 30 ans, 1,72 m, 77 kg)

ŸMaxime Demeautis (33 ans, 1,86 m, 93 kg) vs Christie (GB, 38 ans, 1,87 m, 93 kg) ou Guliaev (Rus, 22 ans, 1,96 m, 96 kg)

ŸGuillaume Grundler (30 ans, 1,72 m, 70 kg) vs Naor (Isr, 23 ans, 1,74 m, 80 kg)

ŸAudric Drogoul (31 ans, 1,80 m, 82 kg) vs Takahashi (Jap, 31 ans, 1,73 m, 91 kg)

ŸYacine Bouchedda (33 ans, 1,80 m, 90 kg) vs Sampath (Srl, 31 ans, 1,72 m, 78 kg)

ŸAli Zeghbab (28 ans, 1,93 m, 110 kg) vs Prakash (Ind, 29 ans, 1,75 m, 74 kg)

ŸShainez Elhaimour (20 ans, 1,65 m, 63 kg) vs une Japonaise (28 ans, 1,56 m, 59 kg)

ŸLudivine Vedapodagom (22 ans, 1,62 m, 58 kg) vs Kriazheva (Rus, 30 ans, 1,72 m, 72 kg)

La légende

De Sato, 1er vainqueur, à Damyanov, tenant du titre, le World Open Tournament n’a cessé d’écrire les meilleures pages de l’histoire du Karaté. Extraits…

1975.

128 combattants de 32 pays. 6 Japonais aux 6 premières places. En finale, Katsuaki Sato domine Hatsuo Royama. Les Américains Martin et Clark intègrent le Top 8.

1979.

Oyama Sosaï a préparé son garde du corps pendant des années. Makoto Nakamura, sculpté en Sumo sans les bourrelets, ne trouve pas d’égal. Il domine Keiji Sanpei en finale. L’Américain Willie Williams se hisse à la 3e place, il est le 1er Occidental sur le podium.

  1. 1984. Makoto Nakamura n’a toujours pas d’égal. Il réalise un exploit qui reste encore unique : conserver le titre de champion du monde toutes catégories ! Il bat à nouveau Keiji Sanpei en finale. Akiyoshi Matsui, l’actuel Kancho de l’IKO, finit 3e. 192 combattants participent.

1987.

C’est l’avènement du prodige. Petit gabarit, Akiyoshi Matsui s’impose haut la main grâce à une technique magnifique doublée d’une vitesse foudroyante. En finale, il domine la légende des sports de combat pieds-poings, le Suisse Andy Hug, 1er Occidental à accéder à la finale. 250 combattants de 112 pays ont participé.

1991.

Kenji Midori combat le poignet cassé. Cela ne l’empêche pas de devenir champion du monde. Il domine son compatriote Akira Masuda en finale. Le Brésilien Francisco Filho remporte le Fighting Spirit Award.

1995.

Oyama Sosaï est décédé, le Kyokushinkaï s’est divisé. 168 combattants de 85 pays participent à cette 6e édition. Le Japon reste maître et invaincu avec le succès de Kenji Yamaki, qui domine Hajime Kazumi en finale. Le Brésilien Francisco Filho est 3e devant l’Australien Gary O’Neill et le Danois Nicholas Pettas. Le Brésilien Glaube Feitosa finit 8e… 5 Occidentaux dans le Top 8 ! Du jamais vu ! 

1999.

C’était pressenti, cela se produit à la 7e édition. Le Japon est vaincu pour la 1ère fois ! Le héros ? Le Brésilien Francisco Filho himself, élève d’Isobe Senseï à Sao Paulo, vainqueur en finale de Hajime Kazumi, déjà finaliste malheureux en 1995. Le Russe Pichkunov, accessoirement garde du corps de Poutine, est 3e, Feitosa 4e, Pettas encore 5e, Ryu Narushima 8e.

2003.

C’est l’heure de la nouvelle génération, du renouvellement des élites. Hormis Feitosa, de nouveau 4e, le Top 8 ne contient que des presque « p’tits jeunes ». Le Japon reprend le trophée grâce à Hitoshi Kiyama, vainqueur heureux du Russe Plekhanov en finale. Le Brésilien Ewerton Teixeira complète le podium. Le combattant russe d’origine tchétchène, Lechi Kurbanov, se classe 5e.

2007.

Il faut de l’expérience pour gagner le World Open Tournament. Ewerton Teixeira fait fructifier sa 3e place de 2003 et devient le 2e Occidental et Brésilien à s’imposer au World Tournament. Dans la 1ère finale sans Japonais, il bat le Tchèque Jan Soukup. C’est même un 1er podium sans Japonais pour cette 9e édition. L’Arménien Artur Hovhanissian terminant 3e. En fait, c’est la Berezina pour le Japon qui ne place qu’un représentant dans le Top 8 à la… 8e place.

2011.

Ewerton Teixeira n’est pas loin de rejoindre Nakamura dans la légende mais il perd en finale face au très jeune Russe (20 ans), Tariel Nikoleishvili, brillant vainqueur. Le Russe Kapanadze finit 3e. 1er et seul Japonais dans le Top 8, Makoto Akaishi est 4e. Le Bulgare Damyanov se classe 5e, le Russe Yeremenko 7e.

2015.

Enfin une petite nation gagne. Ce sera la Bulgarie avec Zahari Damyanov qui domine le Français Djema Belkhodja dans la 3e finale consécutive sans Japonais. 4 Russes figurent dans le Top 8, dont Kochnev,4e, et Zarinyan, 5e. Les Japonais ne sont toujours pas revenus au top. Ueda est 6e, Arata 8e.

 

 A suivre

Antonio Tusseau, le surdoué français et favori pour le titre

Romain Anselmo, 3 fois champion du monde par équipe WKF, 3e Dan Kyokushin, est à Tokyo. Son interview.