A l’aube de l’Open de Paris (24-26 janvier), un talent tricolore va faire son apparition en Premier League. Sydney Yvon (-61kg), 18 ans, pensionnaire d’Argenteuil a tout pour devenir une grande.
Performante en kata comme en kumite chez les jeunes, elle opte pour la voie pugilistique en entrant chez les séniors. Samedi, la jeune Tricolore, 19e mondial, tentera d’illuminer Paris.
Fournier Florian / Photo : FFK
Comme nombre d’enfants qui ouvrent les portes d’un dojo, Sydney Yvon est catégorisée hyperactive. A 7 ans, ses parents tentent de l’inscrire au judo mais sans succès. « C’était trop lisse pour moi », nous dit-elle.
C’est alors qu’un ami de son père a la belle idée de lui parler du karaté. Elle débute à Longuyon, club pour lequel elle a toujours une attache particulière. Dès son 1er entraînement, c’est le coup de foudre. Fougueuse et intrépide, elle va même interpeller Claude Mazzoleni, son professeur, pour faire de la compétition.
« Tu m’inscris quand en compétition ? », lui dit-elle. Ce dernier ne manque pas de lui répondre avec humour : « il faut d’abord t’inscrire au club ». Sydney pensait tout simplement qu’après son cours d’essai, elle faisait automatiquement partie du club !
Après quelques années, elle part au club de Longwy pour être encadrée lors des compétitions. Une expérience qui va forger son jeune caractère car la situation ne va pas être facile.
Un club qu’elle qualifie d’usine à l’époque. « Si on faisait des résultats, on se sentait s, sinon on ne l’était pas trop ».
En concurrence avec une jeune fille formée au club, elle va se sentir mise de côté. Ayant peur que ça freine sa progression, son papa la réinscrit à Longuyon.
Mais son lien avec Longwy ne s’arrête pas totalement. Elle sera coachée par un athlète du club qui possède ses diplômes. Elle deviendra championne de France avec lui.
Commençant à se faire repérer grâce à son talent, elle est contactée par Cherif Tadjer qui lui propose d’intégrer le Karaté Elite Argenteuil. Le contact passe direct entre les deux et l’aventure commence...
Aujourd’hui, elle évoque une relation filiale. « C’est comme un deuxième père. Il y a une vraie alchimie entre nous ».
En parallèle d’Argenteuil, Sydney Yvon intègre le Creps où elle va suivre un parcours scolaire de la 3e à la 1ère et continue de développer son karaté dans ce cursus de haut niveau. Mais elle est mise à la porte, son caractère ne collait plus avec le système mis en place.
Chevronnée et besogneuse, la jeune demoiselle originaire de l’Est de la France va répondre de la plus belle des manières à ceux qui lui ont dit : « Tu ne feras plus rien, tu ne seras plus en équipe de France et tu n’auras pas ton bac ».
L’an dernier, elle est sélectionnée pour les championnats d’Europe Junior, les gagne et obtient son bac. En plus de remporter les championnats de France Senior.
« Je ne suis pas titulaire dans cette équipe. Je dois encore faire mes preuves »
Sortie du système Creps, elle ne se laisse pas abattre et termine ses études en se rajoutant 3h de transport par jour pour aller s’entraîner à Argenteuil. « J’ai pris en maturité. J’ai pris conscience de mes objectifs et de ce que je voulais vraiment ».
Talent indéniable au tempérament bien trempé, la comparaison est toute trouvée avec la légende Alexandra Recchia. « On me le dit souvent mais je ne m’en rends pas compte. Je suis loin d’être Alexandra qui est une légende. Je suis flattée du compliment mais, pour le moment, me comparer à elle, c’est trop ». Lucide, Sydney Yvon reste humble et préfère se concentrer sur elle-même.
En 2023, elle se classe 3e de la Youth League au Mexique en… kata. C’est aussi cela qui fait la spécialité de la jeune Tricolore : être performante en kumite et en kata est une denrée rare. Honnête, Sydney dévoile son secret. « Je ne m’entraîne pas beaucoup en kata. Avant d’être accompagnée par Guillaume Buisson, je m’entraînais sur Youtube ».
Cependant, depuis sa sélection en équipe de France pour la coupe du monde par équipe en novembre à Pampelune, elle a stoppé le kata sur la scène internationale. Une sélection qui l’a rendue fière et heureuse mais elle sait que la route est longue. « Je ne suis pas titulaire dans cette équipe. Je dois encore faire mes preuves ».
Eliminée en quart de finale par les USA, Sydney avait débuté d’entrée. Elle revient sur cet événement marquant de sa jeune carrière : « J’aurais aimé rentrer face au Chili pour me chauffer. Contre les USA, Je n’avais pas conscience de qui j’affrontais (Allen). Je n’ai pas senti de pression particulière. Je me suis dit que j’avais deux cadors derrière moi, qu’il fallait que je fasse mon boulot sans pression. Sauf qu’au moment du salut, j’ai mon KO de Venise qui est revenu et j’ai commencé à réfléchir. Ensuite, pendant le combat, j’ai oublié mais j’ai eu un moment de stress ».
Mais la France ne remontera pas au score. Déçue, elle s’est sentie fautive de cet échec. « Je me suis sentie responsable ».
Revancharde, nul doute que ce moment va construire la suite de sa carrière.
« Être la meilleure pour me qualifier aux Europes séniors »
De retour sur les tatamis pour sa première Karate1, l’objectif est clair : être la meilleure. « Je me dois d’être la meilleure pour me qualifier aux Europes séniors. Laura (Sivert) et Léa (Avazeri) sont des filles talentueuses avec une grande expérience. Je dois aller chercher ma sélection en étant la meilleure d’entre nous à Paris ».
C’est devant le public parisien mais surtout son clan, sa famille, ses amis qu’elle souhaite briller. « Tout mon entourage sera là. De mes grand- parents à mes cousins, en passant par mon club. Ca va être génial. Chez moi, sur mon territoire, vous allez en baver ! »
Dotée d’une grande palette technique, c’est avec la hargne qu’elle l’aime l’utiliser. « J’adore faire mal à mon adversaire en lui mettant des jambes ou des balayages. Un kizami ou un gyaku n’est pas assez impactant à mes yeux. Il faut marquer son adversaire mentalement. C’est ce qui me plaît le plus. Je n’ai aucune limite dans le karaté sportif. Je veux tout gagner ». Tout le mal qu’on lui souhaite.