Il parle 4 langues, est né au Maroc, vit en Espagne et exerce actuellement au Chili. Driss El Mannani, 38 ans, 4e Dan, appartient à cette nouvelle génération d’entraîneurs globe-trotters en mission olympique. En 2016, il est nommé directeur technique du Chili, qui accueille les 32e Championnats panaméricains à partir d’aujourd’hui. Avec 1500 licenciés et 7 athlètes dans les 50 premiers du ranking, le Chili, est certainement le pays le plus dynamique du continent américain.

Par Ludovic Mauchien / Photos : DR


Il est né à Fez, a commencé par le Taekwondo avant de découvrir le Karaté au Dojo d’Ahmed Zehnouni. Il a alors 7 ans et le petit Driss est encore loin d’imaginer que le Karaté va le mener très loin de sa terre natale. Très vite, il devient l’un des tout meilleurs de son pays. 7 fois champion du Maroc, 4 fois champion d’Arabie, il remporte une médaille de bronze aux Jeux Méditerranéens en 2001 et finit 5e des Championnats du monde en 2002 (-60 kg).

En 2005, il stoppe la compétition et se consacre à l’enseignement, d’abord dans un club en Espagne, où il a élu domicile en 2002. Il collabore ensuite avec l’équipe nationale comme conseiller. De 2010 à 2016, il officie comme entraîneur puis responsable des équipes nationales du Maroc. Bilan ? Des podiums mondiaux dans toutes les catégories d’âge, dont la médaille d’argent d’Achraf Ouchène en +84 kg en 2016. Du jamais vu au « pays du Couchant lointain ».

Depuis 2016 et l’avènement olympique du Karaté, Driss El Mannani a émigré Outre-Atlantique et découvre un 3e continent. Directeur technique de l’équipe nationale du Chili, qui accueille les « PanAms » (15-17 juin), il nous fait découvrir la nation montante du Karaté américain.

Comment as-tu atterri au Chili ?

Par l’avion (il éclate de rire). Je suis venu au Chili grâce au président de la Fédération espagnole, Antonio Moreno, qui m’a proposé cette offre. J’habite en Espagne depuis 16 ans. Au Chili, Maria Angelica Coronil, la présidente de la fédération élue il y a deux ans, est très dynamique et ambitieuse. On a une bonne équipe. La fédération pousse très fort pour aider les athlètes et les entraîneurs, offrir toutes les possibilités pour améliorer le niveau du Karaté au Chili.

Existe-t-il une culture Karaté au Chili ?

Oui, mais il n’y a que 1500 licenciés (pour une population de 18 millions). La mentalité est assez particulière. J’attribue cela à l’éloignement. Ce n’est pas un changement radical mais… Les Chiliens ont du mal à accepter le changement, qu’il soit positif ou négatif. Je m’adapte. Je fais en sorte que les athlètes s’adaptent à ma méthode, à la manière avec laquelle je travaille. Cela étant, nous avons eu, ces 18 derniers mois, d’assez bons résultats par rapport à l’histoire du Karaté chilien.

Comment juges-tu le niveau du Karaté chilien ?

On a de bons éléments, surtout chez les Cadets-Juniors. On a eu un vice-champion du monde chez les Cadets en 2017 (Benjamin Nunez en +70 kg). On a aussi fait 2 médailles d’argent en Serie A. Et, aux Championnats Sud-Américains Senior, on finit 2e derrière le Brésil au tableau des médailles. On a gagné 4 médailles d’or comme le Brésil mais celui-ci avait plus de médailles d’argent. Mais, nous, on n’a pas de Kata. En Kumite, nous sommes donc les premiers.

Et on a aussi 7 athlètes classés dans les 50 premiers du ranking mondial. C’est mieux que le Maroc avec ses 35 000 licenciés ! Quand on voit le nombre de licenciés (1500), comparés au Brésil, à l’Egypte et ses 1,8 million de licenciés... Ces résultats sont extraordinaires.

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Benjamin Nunez, vice-champion du monde Cadets en 2017, est l'un des grands espoirs du Karaté chilien. Il est entouré par la présidente de la Fédération, Maria Angelica Coronil, et Driss El Mannani.

 

Quelles sont les ambitions pour ces Championnats panaméricains ?

L’ambition de la fédération et du Comité olympique est d’avoir un athlète sur tous les podiums. L’objectif est de gagner un minimum de 3 médailles d’or. C’est ambitieux mais j’ai confiance dans les athlètes. Je crois qu’on peut gagner ces 3 médailles et monter sur tous les podiums. Ces Championnats, c’est un grand événement ici. Un championnat panaméricain est très important pour des pays comme le Chili, la Colombie, l’Argentine…

Tu as connu différentes générations de Karatékas. Quels sont ceux qui t’ont le plus marqué ?

Pour moi, il y a Ivan Leal et Alex Biamonti. Ce sont les deux meilleurs, comme athlète et comme personne.

Que peut-on te souhaiter ?

Mon objectif est d’élever les athlètes du Chili et de gagner une médaille aux Jeux olympiques. C’est l’objectif de tous les entraîneurs et tous les athlètes. Et je tiens aussi à donner une très belle image du Maroc.