Dans 200 jours, le 6 août 2020, s’ouvriront les 1ers Jeux olympiques de l’histoire du Karaté, 50 ans après les 1ers Championnats du monde. Un événement qui vaut bien une rétro de Tokyo à Tokyo, de 1970 à 2020. 5 décennies riches d’exploits fous, d’aventures humaines incroyables, de combats de ouf’, d’histoires d’hommes. Les 1ers Championnats du monde au Japon et en France, l’école néerlandaise des années 70, l’armada anglaise des années 80-90, l’escouade française des années 90-2000, Valera, Pinda, Van Mourik, Egea, Otto, Milon, Aghayev, Busa… Chaque semaine, nous allons vous raconter une histoire qui a contribué à écrire la grande histoire du Karaté sportif. Episode 1 / les 1ers Mondiaux au Japon : la « Nippon connection »

Par Ludovic Mauchien /  Photos : DR


 

En 1970, à l’heure de l’organisation des 1ers Championnats du monde à Tokyo, le Karaté en est à ses balbutiements. La JKA règne, le Kyokushinkaï se développe, la WKF fait ses 1ers pas.

Les 1ers championnats continentaux sont déjà apparus, en 1966 pour l’Europe. C’est la France qui domine ses années de prémice, notamment un certain Dominique Valera, champion d’Europe en 1969 et 1970, l’homme désigné pour battre les Japonais à Tokyo.

En 1969, un épisode 0 des Mondiaux s’était déroulé au Madison Square Garden à New York. La toute 1ère rencontre mondiale de Karaté a vu la victoire de Dominique Valera. « Ils avaient appelé cela le « World club », se souvient le Français, aujourd’hui 9e Dan. « C’est la 1ère fois que l’on combattait avec touche contrôlée au visage et KO au corps. Je me souviens que Bolo Yeung participait (Ndlr : l’éternel Bolo d’Opération Dragon). En finale, je bats un Américain de 108 kg et 1,92 m ! ».

A l’époque, il n’y a qu’une seule catégorie de poids. La notation ? Waza et Ippon (=2 waza). C’est le temps du « coup qui tue ». Fi des déplacements et des enchaînements, seuls les balayages de Valera amènent du mouvement à ce karaté hyper statique.

Se rendre au Japon en provenance d’Europe était une sacrée aventure. Les Français l’avaient déjà testé en 1966, quand la future équipe de France est partie en Traction direction Russie puis Japon. En 1970, c’est en avion qu’ils vont se rendre à Tokyo. Mais… « Se rendre aux Championnats du monde a été un vrai périple ! », raconte Francis Didier, le président de la FFK qui était du voyage. « On est parti à 12. On a fait Paris-Karachi, Karachi-New Delhi, New Delhi-Bangkok, Bangkok-Hong Kong, Hong Kong-Japon. Cela devait coûter moins cher de faire plusieurs escales... ».

Les Français dominent l’Europe. Ils veulent montrer leur puissance au monde et, surtout, aux Japonais. Pour ménager les susceptibilités nippones, deux tournois distincts sont organisés : l’individuel (une seule catégorie) à Tokyo, fief du Shotokan, et le tournoi par équipe à Osaka, cœur du Shito ryu et du Goju ryu. En tout, 178 Karatékas de 33 pays vont en découdre.

Stupeur ! Les Japonais alignent 5 équipes, les Américains 3 ! Les Français ne se démontent pas. Mais le vent ne souffle pas en leur faveur. Le 1er podium de l’histoire ? Japon E, Japon C, Japon B.

Le lendemain, en individuel, bis repetita. Les Occidentaux se font disperser aux 4 coins des tatamis. Mais, au final, ils accrochent 3 des 4 places sur le podium. Le Canadien John Carnio se hisse en finale, l’Américain Tullener et Dominique Valera accrochent la médaille de bronze. « 1970, c’était un simulacre de championnat du monde ! », peste toujours aujourd’hui le Français. « Tout était fait pour que les Japonais gagnent. Mais, de là à nous mettre 5 équipes, quand même, il y a eu de l’abus ! C’était un peu « truqué ». En équipe, on les affronte en ½ finale. Je fais mon combat contre un Japonais qui fout le camp plutôt qu’autre chose. Et je perds au drapeau ! En individuel, en ½ finale, je tombe contre Wada. Ca recommence ! Je fais tout le combat. Je le fais reculer pendant 3 minutes. Il ne prend pas une initiative et je perds au drapeau, 4-0, décision de 4 juges… japonais !!! ». Koji Wada est ainsi devenu le 1er champion du monde de l’histoire du Karaté.

« On s’est promis que cela ne se passerait pas comme ça à Paris 2 ans après », rappelle Valera. « Et on a tout fait pour. On s’est beaucoup entraîné. Nous avons commencé à créer un noyau, un esprit France. Nous étions une quinzaine. Il y avait une très grande soif de revanche ! »… Mais ceci est une autre histoire.

 

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L'affiche des 1ers Championnats du monde.