Ils sont professeurs de clubs, coachs d’équipes nationales, professionnels ou bénévoles. Ils sont le poumon du karaté, le cœur battant de la pratique. Nous leur donnons la parole dans une série d’interviews. Comment voient-ils et vivent-ils la décision de ne pas autoriser le Karaté aux JO 2024 ? Quelles conséquences ? Comment s’organiser ?...

7e épisode, la Française Stéphanie Bel Lahsen, coach de l’équipe nationale Kata de Hong-Kong, qui entraîne aussi des minots à l’AS Sarcelles et des élites au Team KP. Elle jette un regard à la fois critique et très enclin à l’espoir, à condition de changer certaines choses. Pour mieux rebondir ?

Par Florian Fournier

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Quelle est ta réaction après cette annonce du 21 février excluant le Karat des JO 2024 ?

Je ne vais pas faire de langue de bois, je ne suis pas excessivement surprise par cette annonce. A l'étranger, plusieurs personnes (coaches et officiels) ayant des contacts au sein du CIO redoutaient cette possibilité que le karaté ne soit pas reconduit dans le programme olympique. Ce n'est donc pas une surprise absolue.

Par ailleurs, il est aisé de constater tout le chemin qu'il reste à parcourir à notre sport en terme organisationnel. Grâce à Tokyo 2020, des progrès ont été faits mais beaucoup de choses doivent encore évoluer sur le circuit international.

Il suffit de parler avec les différents acteurs sur le terrain pour se rendre compte que le karaté a évolué vers des contraintes et des exigences de type professionnel pour les athlètes, les arbitres et les coaches mais sans contreparties.

Beaucoup de travail reste à faire du côté des institutions mondiales pour accompagner cette évolution, qui s'est faite dans l'urgence, et pour mieux soutenir les acteurs qui sont au cœur de ce système (athlètes, coaches et arbitres).

Néanmoins, même si je ne suis pas surprise par cette décision, le fait que le karaté risque (car il reste une chance au regard des diverses procédures et de l'agenda du CIO) de ne plus être olympique m'attriste et j'avais espoir que les instances du karaté françaises soient convaincantes. Le karaté est un sport magnifique alliant performance physique et intelligence tactique.

« LES SPHERES DU CIO SONT COMPOSEES D’UNE ELITE DONT IL FAUT PARTAGER LES CODES ET LE LANGAGE »

L’organisation pour tes athlètes est-elle remise en question ?

Non, rien ne change vraiment ! Mes athlètes qui se battent pour une qualification à Tokyo poursuivent leur chemin pour atteindre leur rêve. Quant aux autres, le but sera le même qu'avant Tokyo 2020, décrocher un titre de champion du monde. Cette annonce ne doit pas nous arrêter ! Le karaté est au programme additionnel de Tokyo, il n'était pas olympique avant, nous ne savions pas s'il le serait après. Donc, encore une fois, ce n'est pas une surprise et vu la tournure que prennent les JO... L'intérêt d'y figurer est moindre.

Le côté négatif est évidement lié au soutien des athlètes et des projets. Il est plus facile d'obtenir des sponsors, des aides, des subventions lorsque le sport est olympique et lorsque l'athlète prépare les JO.

Quel discours tiens-tu auprès des enfants que tu entraînes à Sarcelles ?

Pour les jeunes, ma philosophie reste la même : devenir champion(ne) du monde est un bel objectif, travaillons dur pour cela ! Le plus important est de préserver la motivation des jeunes générations, de ne pas se disperser, de continuer à les faire rêver !

N'oublions pas que le karaté est rentré au programme de Tokyo 2020 par la petite porte : catégories et nombre d'athlètes restreints, médailles non comptabilisées dans le classement olympique des nations... Le travail de lobbying pour le maintenir dans le programme de Paris 2024 était titanesque ! Les sphères du CIO sont composées d'une élite dont il faut partager les codes, le langage, le cadre de référence...